LES VIOLENCES CONJUGALES, QU’EST CE QUE C’EST ?
La violence conjugale désigne les actes de violence commis, au sein d’un couple, par l’un des conjoints sur l’autre, et ce quelque soit le statut de la conjugalité : mariage, union libre, pacs, concubinage…
Les formes des violences sont multiples et peuvent coexister. Leurs manifestations sont les suivantes :
- physiques (bousculades, coups avec ou sans objet, strangulations, morsures, brûlures, séquestrations…) ;
- verbales (injures, menaces, intimidations, dévalorisations…) ;
- psychologiques(harcèlement, humiliations, chantages affectifs, interdiction de fréquenter des amis, la famille…) ;
- sexuelles (agressions sexuelles ou viols) ;
- matérielles (briser ou lancer des objets) ;
- économiques (contrôle des dépenses, suppression de la carte vitale, des moyens de paiement, interdiction de travailler) ;
- au moyen de confiscation de documents (carte nationale d’identité, passeport, livret de famille, carnet de santé, diplôme, etc.) ;
Vous n’êtes pas responsable des actes de votre partenaire ou ex-partenaire. Quelles que soient ses explications et justifications, il n’a pas le droit de vous agresser. Il est seul responsable de ses actes de violences qui sont punis par la loi.
- cyber-violences (cyber-intimidation, cyber-harcèlement…).
Vous avez des droits, quelle que soit votre situation : mariée, en concubinage, liée par un PACS, séparée, divorcée.
La loi protège les victimes et organise pour elles une écoute, une orientation et un accompagnement. Elle prévoit des sanctions, un suivi et/ou une prise en charge pour les auteurs de violences.
QUE RISQUE L’AUTEUR DES VIOLENCES CONJUGALES ?
Les violences conjugales peuvent constituer des délits ou des crimes.
Dans tous les cas, son auteur s’expose à une peine de prison et à une amende.
- Sanctions pénales en cas de violences physiques
De manière générale, commettre un acte de violence physique contre quelqu’un est une infraction, et en tant que tel puni par la justice pénale.
Le fait que l’acte de violence physique ait été commis par l’époux, l’ex-époux, le concubin ou le partenaire de pacs aggrave l’infraction et alourdit les peines : il s’agit d’un acte de violence conjugale physique.
Le lien affectif est considéré comme une circonstance aggravante depuis la loi du 4 avril 2006.
Les violences physiques qui entraînent une incapacité totale de travail (ITT) inférieure ou égale à 8 jours pour la victime ou n’ayant occasionné aucune ITT peuvent être punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
La peine d’emprisonnement peut être portée à 5 ans ou 7 ans s’il y a des circonstances aggravantes.
Si ces violences entraînent une ITT supérieure à 8 jours, la sanction peut atteindre 5 années d’emprisonnement et une amende de 75 000 euros.
La peine d’emprisonnement peut être portée à 7 ans ou 10 ans s’il y a des circonstances aggravantes.
Les violences conjugales répétées, qui surviennent de manière régulière, habituelle, sont encore plus lourdement sanctionnées. Le caractère habituel des violences conjugales constitue en effet une circonstance aggravante.
Les violences habituelles entraînant une ITT inférieure ou égale à 8 jours sont punies de sanctions pénales pouvant se porter à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.
Une peine d’emprisonnement portée à 10 ans et une amende à 150 000 euros si l’ITT est supérieure à 8 jours.
La violence conjugale physique peut entraîner la mort de la victime. Dans ces cas-là, les peines encourues sont de 20 ans de réclusion criminelle si les violences ont entraîné la mort sans intention de la donner (30 ans si les violences étaient habituelles).
Le conjoint violent qui a donné volontairement la mort ou a eu l’intention de la donner encoure la réclusion criminelle à perpétuité.
- Sanctions pénales en cas de psychologiques ou sexuelles
Le harcèlement moral au sein d’un couple peut être puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000euros d’amende si le harcèlement est à l’origine d’une ITT inférieure ou égale à 8 jours.
Le harcèlement conjugal sexuel est puni quant à lui de sanctions pouvant atteindre 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.
Le viol de son conjoint est puni d’une peine d’emprisonnement de 20 ans de réclusion criminelle.
En cas de violence conjugale légère ou isolée, le procureur de la République peut décider d’abandonner les poursuites pénales. A la place, il pourra recourir à des alternatives aux poursuites :
- Un rappel à la loi de l’auteur des violences conjugales effectué par un enquêteur ou un délégué du procureur ;
- Un sursis à poursuite : l’affaire est classée sans suite si aucun incident nouveau n’intervient pendant un certain délai défini par le procureur. Dans le cas contraire, des poursuites sont engagées par le procureur.
- Une médiation pénale pour indemniser les préjudices de la victime et tenter de réconcilier les conjoints. La victime doit être d’accord pour que cette alternative soit prononcée par le procureur.
Le procureur peut également recourir à la composition pénale lorsque l’infraction commise expose à une peine d’emprisonnement inférieure à 5 ans.
VOUS ÊTES VICTIMES DE VIOLENCES CONJUGALES, QUOI FAIRE ?
SIGNALEZ LES FAITS A LA POLICE OU A LA GENDARMERIE
Que les faits soient anciens ou récents, les policiers et gendarmes ont l’obligation d’enregistrer votre plainte, même si vous ne disposez pas d’un certificat médical. Si vous ne voulez pas déposer plainte, vous pouvez signaler les violencesen faisant une déclaration sur main courante (police) ou un procès-verbal de renseignement judiciaire (gendarmerie).Il s’agit d’un élément de preuve dans le cadre de poursuites ultérieures. À votre demande, un récépissé de votre déposition vous sera remis ainsi qu’une copie intégrale de votre déclaration.
Vous pouvez également porter plainte en vous adressant directement au Procureur de la République (lettre recommandée avec accusé de réception, datée et signée, adressée au Tribunal judiciaire compétent par rapport au lieu où les faits ont été commis).
Mon cabinet se propose de vous accompagner tout au long de cette procédure, notamment en rédigeant la plainte avec constitution de partie civile.
Qu’une plainte soit déposée ou non, il est important de faire constater par un médecin les violences subies, à la fois physiques et psychologiques. Le certificat médical de constatation est un élément de preuve utile dans le cadre d’une procédure judiciaire, même si elle a lieu plusieurs mois après. Il peut être établi soit à l’hôpital (dans les unités médico-judiciaires avec une réquisition d’un officier de police judiciaire ou au service des urgences) soit par un médecin généraliste. Il doit être fait le plus tôt possible pour servir de preuves.
RASSEMBLER DES TÉMOIGNAGES
Pour appuyer votre déclaration et, éventuellement, engager des poursuites judiciaires, les témoignages écrits de proches, amis, voisins peuvent être utiles. Ils doivent être datés, signés et accompagnés d’une copie de la pièce d’identité du témoin.
LES MESURES DE MISE EN SÉCURITÉ POUR VOUS PROTÉGER,LORSQUE VOUS DÉPOSEZ PLAINTE :
En cas de dépôt de plainte, des mesures de protection immédiates peuvent être prises par le juge pénal :
- l’interdiction pour l’auteur de vous rencontrer ou de vous approcher;
- l’interdiction pour l’auteur de fréquenter certains lieux ;
- la dissimulation de votre adresse et votre domiciliation à la police ou à la gendarmerie ;
- l’obligation d’un suivi pour l’auteur;
- le placement en détention provisoire ;
- l’octroi d’un téléphone de protection pour alerter ;
- les forces de sécurité en cas de danger grave.
À votre demande, et en cas de risque de nouvelles violences, l’éviction de l’auteur des violences peut être prononcée pour vous permettre de rester dans le domicile conjugal.
LES MESURES DE PROTECTION POSSIBLES DANS LE CADRE DE L’ORDONNANCE DE PROTECTION :
Vous êtes en danger en raison de violences exercées par votre partenaire ou ex-partenaire, vous pouvez obtenir rapidement du Juge aux affaires familiales une ordonnance de protection.
Elle peut être prise avant ou après un dépôt de plainte.
La durée des mesures de protection est de 6 mois.
Vous pouvez demander à bénéficier provisoirement de l’aide juridictionnelle pour couvrir les frais d’avocats et les éventuels frais d’huissier et d’interprète.
Si l’auteur des violences ne respecte pas ces mesures, vous pouvez déposer plainte car il s’agit d’un délit puni de 2 ans d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
Le juge peut également vous autoriser à dissimuler votre adresse et à élire domicile chez un avocat, auprès du procureur de la République ou d’une personne morale qualifiée (associations).
Pour vos enfants, le juge fixera les modalités d’exercice de l’autorité parentale et éventuellement la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants. Vous pouvez obtenir l’interdiction de sotie du territoire pour les enfants.
Notre Cabinet s’est entouré d’une équipe de spécialiste pour vous accompagner tout au long de la procédure, civile et pénale.
LES VIOLENCES CONJUGALES, COMMENT LES STOPPER ?
La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a permis des avancées concrètes pour les victimes de violences conjugales :
La loi du 3 août 2018 portée par la secrétaire d’État Marlène Schiappa a également instauré :
- La création de 1 000 places en hébergement et en logement
5 240 places d’hébergement et de logement sont déjà réservées aux femmes victimes de violences conjugales. À partir de janvier 2020, 1 000 nouvelles places seront disponibles, dont 250 places en hébergement d’urgence et 750 places spécifiques pour les femmes ayant des enfants. Au total, 5 millions d’euros sont mobilisés dans ces créations.
- Une plateforme pour signaler en ligne des actes de violences
Anonyme et disponible 24h/24 et 7j/7, une plateforme de signalement en ligne pour les victimes de violences sexuelles et sexistes a été lancée il y a un an. Chaque victime peut s’y rendre et être en contact direct avec un policier ou gendarme de sa ville spécialement formé. Ce dernier est là pour les accompagner soit vers un dépôt de plainte, soit vers des interlocuteurs spécifiques pouvant leur apporter assistance.
- Un meilleur accueil des victimes dans les commissariats et gendarmeries
Beaucoup de femmes sont sous le choc, parfois atteinte d’un syndrome de stress post-traumatique, lorsqu’elles arrivent dans un commissariat afin de dénoncer leur agresseur. Leur accueil est alors délicat et nécessite tact, compréhension et prudence.
Pour y faire face :
- 73 psychologues vont être recrutés dans les commissariats et gendarmeries afin d’accompagner les femmes dans leurs plaintes ;
- Les agents de police et de gendarmerie ont reçu et continueront de recevoir des formations spécifiques à la prise en charge de ces femmes.
- Généraliser la possibilité de porter plainte à l’hôpital
Demander à une femme qui vient à l’hôpital pour coups et blessures de retourner chez elle, et donc de retrouver son conjoint, avant de pouvoir à nouveau se rendre dans un commissariat pour porter plainte, c’est la double peine.
Afin de centraliser les démarches des victimes, la possibilité de porter plainte directement à l’hôpital sera généralisée et encouragée.
- Aménagement de l’autorité parentale d’un conjoint violent
Aujourd’hui, dans le cas d’une femme battue ayant des enfants, le juge n’a que deux options : retirer l’autorité parentale du père sur ses enfants ou ne pas toucher à son autorité parentale. La radicalité d’un retrait a, dans les faits, souvent amené les juges à ne pas y toucher.
Car chaque situation est différente, le juge disposera désormais de plus d’options : suspendre l’autorité parentale, retirer uniquement le droit de visite et d’hébergement, offrir la possibilité à la mère de choisir elle-même ce qu’elle souhaite pour ses enfants tout en continuant à percevoir sa pension alimentaire, etc.
Dans le cas d’un homicide volontaire par le conjoint, l’exercice de l’autorité parentale de ce dernier sera suspendu de plein droit.
- Mise en place à venir d’un « bracelet anti-rapprochement »
Si depuis 2010, un juge peut déjà interdire à un conjoint violent d’entrer en contact avec sa victime, rien n’existe encore pour s’assurer, en temps réel, que cette interdiction soit bien respectée.
C’est pourquoi le gouvernement a annoncé son souhait de mettre en place un dispositif de « bracelet anti-rapprochement » dès cette année.
Concrètement, le conjoint violent portera un bracelet électronique inamovible, connecté à un récepteur porté par la femme victime. Si un rapprochement illicite est constaté, les forces de l’ordre seront immédiatement alertées et pourront intervenir. Le port du bracelet pourra être ordonné par le juge dans deux situations :
- En cas de condamnation pour violences conjugales ;
- Mais aussi AVANT toute condamnation, dans le cadre d’un contrôle judiciaire ou d’une ordonnance de protection.
« Féminicide » : L’Etat condamné pour faute
Le 4 août 2014, Isabelle Thomas était au téléphone avec police secours quand elle et ses parents sont abattus par son ancien conjoint, au terme d’une course-poursuite dans les rues de Grande-Synthe, près de Dunkerque.
A noter que la victime avait déjà déposé une première plainte le 27 juin 2014 pour violences conjugales. Son ex-compagnon, Patrick Lemoine, avait été placé en garde à vue puis sous contrôle judiciaire avec interdiction d’entrer en contact avec elle et devait être jugé le 13 août 2020.
La famille avait porté plainte contre l’Etat.
Dans une décision datant de mars 2020 mais publié le 21 avril 2020, le Tribunal a estimé qu’était caractérisée la faute des services de police, en ce que cette faute a mis en position Patrick Lemoine d’assassiner son ex-compagne Isabelle Thomas et ses beaux-parents.
Le Tribunal a condamné l’Etat à indemniser à hauteur de 100 000 euros le préjudice moral subi par la famille de la victime.