Il avait utilisé une bombe lacrymogène jeudi lors d’une altercation avec des taxis grévistes.
Il est «venu pour en découdre» affirme le ministère public. «Légitime défense !», répond son avocat. Un chauffeur VTC qui avait utilisé une bombe lacrymogène lors d’une altercation jeudi avec des taxis grévistes a été condamné à Créteil à dix mois de prison, dont six ferme.
«Maraudage porte C !», grondent les grévistes quand ils l’aperçoivent, jeudi au petit matin, devant le terminal ouest de l’aéroport d’Orly (Val-de-Marne), selon la déposition de l’un d’eux, lue à l’audience. Ils se précipitent alors vers ce chauffeur VTC de 29 ans, qu’ils connaissent bien et lui demandent «pourquoi il est là». Échanges d’insultes, menaces et le chauffeur VTC les «arrose» avec une bombe lacrymogène qu’il sort de sa sacoche. Trois policiers sont sur place : il est interpellé.
Arrivé à l’audience en boitillant, équipé d’une béquille en raison d’une jambe affaiblie par un accident de la route en 2013, ce grand gaillard à la barbe mince donne une tout autre version des faits. Lui dit avoir simplement «accompagné un ami» à l’aéroport, puis être resté pour discuter avec des motos-taxis. «Une soixantaine de chauffeurs» lui ont soudain fait face, affirme-t-il. «Ils m’ont dit “on va t’enculer”. J’ai tempéré en essayant de discuter», mais «ils m’ont craché dessus, jeté des projectiles, menacé de mort». Il estime alors la police «débordée», concède un moment de «panique» et se saisit de sa bombe lacrymogène qu’il garde toujours sur lui «par précaution». «Sinon, je ne serais pas là. Je serais à l’hôpital, bredouille-t-il. J’ai eu peur notamment qu’ils frappent ma jambe car je suis handicapé.» Il ajoute, avant que le tribunal se retire pour prendre sa décision : «Je ne suis pas suicidaire pour aller dans un aéroport lors d’une manifestation de taxis, quand on sait ce qu’ils sont capables de faire.»
Le substitut du procureur pense que si : «Il savait que les taxis allaient manifester et il vient avec quoi ? Une bombe lacrymogène !». Une attitude que la magistrate «met en parallèle» avec «son comportement» en garde à vue, notamment des propos tenus à l’égard des chauffeurs de taxis. «C’est des pédales !», lance-t-il d’abord, les qualifiant ensuite de «pédés», face à des policiers qui notent chaque terme dans leur procès-verbal. Il se braque ensuite et refuse de signer le PV tant que ses propos sont consignés. Le ton monte avec la police, puis avec sa propre avocate. «Quand on lit cette procédure, on voit que le prévenu est venu pour en découdre», estime le ministère public. Après avoir égrené ses précédentes condamnations pour violences, la magistrate requiert un an de prison ferme.
Libération – 26 juin 2015